L’Afrique : événements géo-historiques, géopolitiques et géoéconomiques du passé, de l’actualité et de l’avenir.

L’Afrique sous la domination, la dépendance et l’aliénation depuis et pendant quatorze siècles (VIIème-XXIème siècles) : le continent africain en évolution – de civilisations étrangères en civilisations étrangères africanisées.

Le continent africain est le berceau de l’Humanité. La première femme et le premier homme, qui sont les ancêtres du genre humain, sont apparus en Afrique de l’est, au site d’Abyssinie (en actuelle Éthiopie et Érythrée). Ces ancêtres, le père et la mère de l’Humanité, ont vécu en Afrique. Ils ont engendré les premiers hommes et femmes du genre humain il y a de cela 142 mille ans, au dit site nord-est de l’Afrique. Un grand nombre d’êtres parmi les premiers hommes et premières femmes ont quitté l’Afrique. Ils ont traversé des espaces et des mers pour aller s’établir partout ailleurs, dans d’autres terres d’accueil, sur d’autres continents. Au terme de 130 mille ans, les hommes et femmes partis du lieu d’origine de l’Humanité, le continent africain, avaient fini par coloniser et peupler toute la planète Terre, devenue leur demeure de vie.

            Autant le globe terrestre a été conquis et habité par le genre humain, autant le continent africain a été conquis et habité par les Africains qui, à la fin du XXème siècle, étaient 850 millions (devenus 1,2 milliards en 2018). Ils sont à peu près 1,3 milliards aujourd’hui, en 2019. Les populations africaines seront 2,5 milliards d’hommes et de femmes d’ici les trente-et-une futures années, en 2050. Ils seront 4,3 milliards fin ce siècle, en 2100.

            Le continent africain est un territoire vaste : il s’étend sur une surface de 30,816 millions de km2. La vastitude de la plateforme africaine est égale à plus de trois fois celles des États-Unis d’Amérique, de la Chine et de l’Europe. En d’autres termes, le territoire du continent africain est égal aux territoires des États-Unis d’Amérique, de la Chine, de l’Europe et du Moyen-Orient réunis. Sur la vastitude de l’Afrique, vivaient les populations africaines de 1,2 milliards de personnes début 2018 – en cours de s’approcher des 1,3 milliards d’Africains à mesure que nous approchons de la fin de l’année 2019.

            Le continent africain a été réinventé et réorganisé en plus d’une demi-centaine de pays par la Conférence Diplomatique Européenne sur l’Afrique en 1885. Cette réorganisation s’est effectuée à l’image des pays européens, eux-mêmes réinventés et organisés par le Congrès de Vienne septante ans auparavant, soit en 1815. Ces pays africains créés par la Conférence Diplomatique Européenne de Berlin en 1885 ont accédé aux indépendances africaines en 1960. En même temps, ils ont été élevés au rang d’États souverains et de Nations africaines, membres de la Communauté Internationale au sein de l’Organisation des Nations unies (l’O.N.U.), ainsi que de la Communauté et Famille Africaines que fut l’organisation de l’unité africaine (l’O.U.A., devenue l’actuelle Union africaine, homonyme de l’Union européenne et à son image). Sur proposition du roi des rois d’Afrique, Mouammar Kadhafi, L’Afrique s’est alignée sur le modèle de l’Europe.

            L’évolution du continent africain s’est arrêtée à l’époque de l’âge de fer : elle est figée depuis 3 mille ans. Dès le VIIème siècle de notre ère, l’Afrique a été conquise par la puissance arabo-musulmane du Moyen-Orient qui en a fait son terrain d’extension de l’Islam et son terrain de chasse esclavagiste. Le continent africain est ainsi sous la plaque de la civilisation arabo-musulmane depuis 1400 ans.

            Face à la menace de voir le Moyen-Orient conquérir et se rendre maître de l’Afrique, l’Europe a réagi par la voie de la Conférence Diplomatique Européenne de Berlin. Celle-ci a décidé que l’Europe prenne d’assaut le continent africain et le colonise pour créer entre les deux continents le lien de communauté de destin ; communauté qui s’incarne par la relation entre l’Union européenne et l’Union africaine. La relation euro-africaine en cours depuis 1885 s’est renforcée d’années en années, de décennies en décennies, depuis 134 ans (1885-2019). L’Afrique est sous la deuxième plaque : celle des cultures et des civilisations européennes. L’Afrique européenne est anglophone, francophone, lusophone et hispanophone. L’Afrique n’a pas de culture africaine : elle a 3000 cultures africaines qui correspondent à 3000 langues africaines, expressions et cultures venant d’autant d’ethnies qu’étaient les états premiers rassemblés en une demi-centaine de pays colonisés par l’Europe.

            L’Europe qui a réinventé, réorganisé, colonisé et dominé l’Afrique depuis bientôt 1,5 siècle (1885-2019) ne peut pas l’abandonner. Le président Houphouet Boigny, père fondateur de la Côte d’Ivoire, a prédit que : « Qui aura l’Afrique dominera le Monde. » La raison pour laquelle l’Europe a conquis et domine l’Afrique se trouve en la nécessité d’assurer la sécurité européenne à sa frontière, au sud de la mer Méditerranée. L’Europe veille à ce qu’il n’y ait pas une puissance occupant le continent africain et menaçant l’Europe à cette frontière.  Une force en Afrique hostile à l’Europe amènerait cette dernière à déclencher une guerre d’autodéfense et dévastatrice pour les continents européen et africain. Pourquoi l’Europe exerce-t-elle une pression de domination sur l’Afrique ? C’est, entre autres, pour garantir de bonnes relations de voisinage entre les trois continents du pourtour de la mer Méditerranée : l’Europe, l’Afrique et le Moyen-Orient (territoire d’Asie). Cette force n’est autre que le bras armé du Moyen-Orient et du monde arabo-musulman en état de revanche pour les nombreux « casus belli » constituant autant de défis qui se sont cumulés ; autant de défis à relever par le dit bras armé prêt à combattre et à conquérir l’Europe via l’Afrique. Les « casus belli » qui appellent le Moyen-Orient et le monde arabo-musulman à se venger de l’Europe s’étendent sur plus de deux millénaires :

  1. L’invasion de l’armée gréco-macédonienne d’Alexandre le Grand au Moyen-Orient en 2.300 avant Jésus Christ : casus belli ;
  2. La conquête et la colonisation romaines du Moyen-Orient dont la crucifixion de Jésus Christ sous le règne de Ponce Pilate en est le témoignage ;
  3. Les invasions européennes au nom des croisades pour combattre la naissance et l’extension de l’Islam en Terre Sainte : casus belli ;
  4. L’expulsion au XIVème siècle du Portugal et de l’Espagne des forces et des citoyens arabo-musulmans qui avaient conquis l’Europe pour l’Islam ;
  5. L’expulsion des forces arabo-musulmanes de commerce d’esclaves africains et la colonisation européenne de l’Afrique depuis 1885 : casus belli ;
  6. L’installation en Palestine des juifs chassés d’Europe pour créer Israël en 1948 et la conséquente expulsion des Palestiniens de leur pays : défi ;
  7. Les récentes guerres du Golfe menées par l’Occident qui est l’Europe en extension, l’assassinat de Saddam Hussein et de Mouammar Kadhafi : défis ;
  8. La destruction d’Al-Qaïda, l’assassinat de son créateur Oussama Ben Laden et la destruction de l’État Islamique (DAESH) en 2018 : casus belli.

            La force armée ou bras armé du Moyen-Orient et du monde arabo-musulman qu’est aujourd’hui la force du djihadisme islamiste n’oublie rien ni de ce que fut le passé, ni des défis à relever, ni des casus belli entre le Moyen-Orient et l’Europe, quelles que soient les années. Le Moyen-Orient et l’Europe sont en guerres millénaires qui se poursuivent par la voie de celui qui domine et contrôle l’Afrique parmi eux. Pour relever ces défis et mener les « guerres saintes » que le djihadisme se croit en devoir de faire au nom d’Allah, le bras de vengeance est éclairé par la loi antique du talion. Pour ce bras du djihadisme, l’Europe doit être combattue, conquise, islamisée et faire partie de l’empire du Khalifa islamique mondial, dont les trois composantes fondamentales de base seraient le Moyen-Orient, l’Afrique et l’Europe.  Pour la conquête de l’Europe par le djihadisme islamiste, les géostratèges du djihadisme conquérant estiment que l’Afrique est la plateforme indispensable. Selon eux, elle doit être conquise et islamisée, car elle a pour vocation d’être la terre de l’Islam et du Khalifa islamique. Les géostratèges européens sont bien au courant de cette vision de leurs collègues du Moyen-Orient. Ils sont vigilants sur le cas de l’Afrique. Par conséquent, le continent africain entre les mains de l’Europe reste et restera sous la domination européenne pendant longtemps. En effet, sa faiblesse, qui risquerait de le projeter dans les bras du djihadisme islamiste combattant et conquérant, ne rassure pas la sécurité de l’Europe.

            Le Moyen-Orient et l’Europe ont été coresponsables du crime contre l’humanité et contre l’Afrique. Par exemple, le crime d’esclavagisme arabo-musulman commis par le Moyen-Orient pendant 1200 ans (VIIème-XIXème siècle). Le même crime a été commis par l’Europe pendant 400 ans : c’est le crime de la traite esclavagiste transatlantique triangulaire entre l’Europe, l’Afrique et l’Amérique. L’Afrique a été/est victime de ses deux voisins malveillants.

            La question de fond est : « À qui, entre le Moyen-Orient et l’Europe, appartient le continent africain ? » Du VIIème au XIXème siècle (pendant 1200 ans), l’Afrique a appartenu au Moyen-Orient qui en a fait son terrain de chasse d’esclaves noirs, réduits en marchandise des commerçants arabo-musulmans qui les vendaient partout dans le monde, au Moyen-Orient, en Asie et ailleurs au cours du 1,2 millénaire d’appartenance. Depuis la fin XIXème siècle, à l’issue de la Conférence Européenne de Berlin sur l’Afrique en 1885, l’Europe s’est emparée du continent africain. Elle a aboli le commerce d’esclaves africains, a chassé les commerçants moyen-orientaux esclavagistes arabo-musulmans hors du continent, a tenu l’Afrique dans les tenailles sous sa colonisation dure (« hard colonization ») pendant septante-cinq ans (1885-1960), et, sous son accompagnement en douceur (« soft colonization »), pendant bientôt 60 ans (1960-2020). Le Moyen-Orient, par son bras armé et déterminé, le djihadisme islamiste combattant et conquérant, espère reconquérir l’Afrique à son service et pour le projet millénaire arabo-musulman du Khalifa islamique mondial, dont les trois grands piliers géographiques seraient, d’après les géostratèges islamistes : le Moyen-Orient, le continent africain et le continent européen.

            Le continent africain, à la suite du vent violent déchaîné par la chute du mur de Berlin en novembre 1989, s’est livré au suicide : il s’est plongé dans des conflits armés d’absurde autodestruction, d’autocolonisation et d’autodéshumanisation qui ont culminé dans le triste IIIème génocide du XXème siècle : le génocide au Rwanda en 1994. Constatant cette Afrique tombée en catastrophe, le célèbre journaliste new-yorkais William Pfaff a observé que le continent africain est en naufrage. Dans son article publié dans l’hebdomadaire Jeune Afrique (édition du 05 octobre 1994), il a affirmé haut et fort que : « Seule l’Europe peut sauver l’Afrique du naufrage. » Il a conseillé l’Union européenne d’envisager de sauver l’Afrique du naufrage et de la remorquer pendant une nouvelle colonisation de cinquante ans, voire de tout un siècle. Cependant, c’est à la Chine qu’est revenue cette intuition. L’Empire du milieu, qui depuis longtemps fascine les dirigeants africains et hypnotise toute l’Afrique, a saisi cette fascination et hypnotisation comme une opportunité pour enrichir davantage ses rapports de partenariat « gagnant-gagnant » avec le continent africain. Elle a initié, sur inspiration de la relation France-Afrique, l’exercice de la Chine-Afrique consistant en l’organisation des sommets Chine-Afrique tous les trois ans, tenus en alternance en Chine, à Pékin et en Afrique.

            Le Vème forum Chine-Afrique s’est tenu à Pékin en 2012. Il a révélé que le chiffre d’affaires enregistré par la relation de coopération « gagnant-gagnant » Chine-Afrique l’année précédente avait été très fructueux : 200 milliards de dollars américains.

            Le VIème forum Chine-Afrique s’est tenu en Afrique, à Johannesburg (Afrique du Sud), en 2015. À cette occasion, la Chine a révélé aux participants africains que le gouvernement chinois a décidé de prendre en charge l’industrialisation de l’Afrique. Dans cette perspective, la Chine a décidé d’entreprendre la formation de 250 mille jeunes Africains destinés à être des industriels africains. Deux-cent mille de ces jeunes provenant de tous les pays africains seront formés au cours des années prochaines en Chine, et cinquante mille en Afrique, dans leur pays respectif. La Chine créera des établissements chinois Confessius dans différents pays africains pour l’apprentissage populaire de la langue et de la culture chinoises.

            Le VIIème forum Chine-Afrique s’est tenu à Pékin les 03-04 septembre 2018. Lors de cette rencontre des deux partenaires, la Chine a mis sur la table une juteuse enveloppe de 60 milliards des dollars américains pour l’industrialisation de l’Afrique par la Chine au cours des prochaines années. La Chine s’est engagée à créer des infrastructures de soutien de l’industrialisation et de la commercialisation en Afrique et hors d’Afrique des biens « made in Africa. » Le discours de clôture de ce sommet historique Chine-Afrique prononcé par le président chinois a été diffusé sur les télévisions de la planète. Le président a fini le sommet le 04 septembre 2018 en soulignant que les dirigeants africains ont accepté d’être accompagnés par la Chine de leur plein gré, en toute souveraineté qui est celle de chaque État africain partenaire de Chine.

Cette déclaration solennelle du tout puissant chef d’État de l’Empire du milieu est la signature de la Chine. Les applaudissements nourris des chefs d’État africains et de leurs nombreuses délégations équivalent à autant de signatures africaines, des signatures de toute l’Afrique.

            Le Monde a reproché à la Conférence de Berlin sur l’Afrique en 1885 de n’avoir impliqué aucun Africain dans sa prise de décision de coloniser et « civiliser » l’Afrique. La Chine a tenu à reprendre le flambeau afin d’accompagner, d’« infrastructurer » et d’ « industrialiser » l’Afrique avec son accord.

            L’Afrique traditionnelle est là, immuable, comme l’Afrique arabo-musulmane et l’Afrique européenne. L’Afrique chinoise est en marche. Elle sera bientôt rejointe par l’Afrique indienne et asiatique, tel que le révèle l’économiste et observateur français, Jean-Joseph Boillot, dans la publication de l’article intitulé L’Afrique aura son modèle en 2030 sur le réseau social Youtube. Boillot est convaincu que le modèle des B.R.I.C.S. (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) est faux et en fin de vie. Il pense que le modèle des B.R.I.C.S. sera remplacé prochainement par le modèle émergeant et plus efficace, celui du « chinindiafrique. » Il s’agit de la coalition des continents du tiers-monde en économie de croissance à deux chiffres ou proche de 2 chiffres : la Chine, l’Inde et l’Afrique. Ainsi, le continent africain, traditionnellement sous fascination et hypnotisation de la Chine et de l’Asie, sera l’Afrique chinoise et asiatique.

            Outre ces Afriques qui semblent réelles ou, du moins, plus ou moins réelles, il existe des Afriques imaginaires ou utopiques. Il en va du cas de l’Afrique visée par le bras armé des combattants djihadistes de l’intérieur et de l’extérieur du continent africain, lesquels sont animés par la foi que l’Afrique doit être la terre de l’Islam. D’après ces conquérants « fous de Dieu », l’Afrique doit être ramenée au bercail par la force des armes. Aucune armée africaine ou coalition d’armées africaines ne peut résister à l’assaut de 2000, voire seulement de 1000 djihadistes déterminés à conquérir l’un ou l’autre pays africain ou plusieurs de ces pays. C’est le cas d’actualité qui a amené l’O.N.U. à organiser la Conférence Internationale à Nairobi (au Kenya) ; conférence à l’issue de laquelle le secrétaire général de l’O.N.U. a tiré la sonnette d’alarme quant au risque d’une prochaine chute des pays de l’Afrique de l’ouest sous la conquête des combattants djihadistes. La Conférence s’est tenue en urgence le 10 juillet 2019. Les géostratèges et philosophes du djihadisme ne cachent pas à qui veut bien entendre que, tôt ou tard, toute l’Afrique sera conquise pour l’Islam.

            L’autre Afrique de rêves innocents et utopistes vient d’être mise en lumière, respectivement le 21 mars 2018 à Kigali (au Rwanda) et à Niamey (au Niger) par les chefs d’État africains. Il s’agit de l’Afrique de la Z.L.E.C.A.F. (Zone de Libre Échange Africaine ou Marché Commun Africain). L’Afrique se reflète dans le miroir de l’Europe. Elle l’est depuis qu’elle a réussi à établir que l’Union africaine équivaut à l’Union européenne. Les présidents-rois d’Afrique ont décrété que, en 2022, la Z.L.E.C.A.F. fonctionnera, entre pays africains, en échanges des biens « made in Africa » à la hauteur de 60%, au même titre que l’Europe qui réalise ses échanges intra-européens à 68% au terme non pas de trois ans (2020-2022), comme s’imaginent les Dirigeants Africains animés par l’afro-optimisme surréaliste, mais de soixante-deux ans d’efforts (1957-2019).

            Les informations surréalistes et afro-optimistes sur les réseaux sociaux (notamment sur Youtube) et autres fusent et étonnent tout le monde :

  1. L’Afrique veut devenir le plus grand marché du Monde ;
  2. L’intégrale Afrique de presse du 30 mars 2018 : l’Union africaine lance une zone de libre-échange ;
  3. Le sommet extraordinaire de Niamey pour lancer la Z.L.E.C. (Zone de Libre-échange continentale) ;
  4. L’Union africaine lance la plus grande zone de libre-échange ;
  5. L’entrée en vigueur de la Z.L.E.C. : un tournant historique ;
  6. La Zone de libre-échange continentale : projet phare de l’Union africaine ;
  7. La Z.L.E.C. : une chance pour l’Afrique ? ;
  8. L’Union africaine lance la plus grande zone continentale de libre-échange ;
  9. L’Africa News : la zone de libre-échange continentale ;
  10. L’historique est fait : l’Afrique lance officiellement la zone de libre-échange ;
  11. Talk Africa : la zone de libre-échange continentale africaine ;
  12. Le face à face : la zone de libre-échange constitue-t-elle une opportunité pour l’Afrique ?

            Le projet Z.L.E.C. est l’invention des dirigeants africains qui pensent que, pour sortir du naufrage du sous-développement, la solution serait que toute l’Afrique soit transformée en marché des échanges de commerce et en marché de consommation des biens et produits « made in Africa. » Ce marché d’échanges commerciaux « made in Africa » vient d’être lancé officiellement le 07 juillet 2019. C’est une nouvelle d’été. Le marché de consommateurs africains du « made in Africa » serait constitué par le 1,2 milliards d’Africains, à savoir toutes les populations africaines. Ce qui étonne est que les populations africaines confrontées quotidiennement à la lutte de survie dans la misère, la pauvreté, le désœuvrement, le chômage collectif, le dénuement, la faim et le désespoir qui les poussent à fuir l’Afrique ; ces populations n’ont aucun pouvoir d’achat qui leur permettra de faire partie de ce marché de consommateurs des biens et produits « made in Africa. » Par ailleurs, l’échange de biens et produits consommables par les populations de tout le continent africain, et ce dans un cours délai (2020-2022), suppose que l’Afrique est couverte d’infrastructure de transports interafricains routiers, ferroviaires et fluviaux. Or, on laisse entendre que ce problème est quasi résolu, puisque les biens et produits à échanger entre les multiples pays africains pourront être transportés par voies aériennes, en attendant la construction des infrastructures routières et ferroviaires par la Chine qui s’est engagée à la faire à l’issue du sommet Chine Afrique des 03-04 septembre 2018. À cet effet d’infracturisation et d’industrialisation africaines, la Chine a mis sur table 60 milliards de dollars américains. Cela signifie que les produits et biens « made in Africa » à transporter par avions coûteront énormément cher aux consommateurs africains sans ressources. Pour que les consommateurs africains soient à la hauteur de satisfaire les ambitions du projet Z.L.E.C. des dirigeants africains, il faudrait que chaque Africain puisse disposer d’une capacité de pouvoir d’achat de l’ordre de 4.000 dollars américains par an, soit l’équivalent de 334 dollars américains par mois. Les dirigeants africains proposent à leurs peuples de trouver le salut en constituant le plus grand marché de consommation au monde et, grâce à cela, de retrouver la voie du bonheur. En clair, la Z.L.E.C. des dirigeants africains est un clin d’œil au capitalisme, à l’Europe, à l’Occident et à la mondialisation. C’est un projet qui enflamme la toile des communicants en cet été pour le bonheur des réseaux sociaux.

            La seule issue de ce projet Z.L.E.CC, qui part perdant et perdu, semble une solution appelant l’Europe au secours. Il s’agit d’une solution intitulée : « La zone de libre-échange africain vers un méga-accord commercial avec l’Europe. » Elle a été formulée par Stefen le Fhou, dirigeant de la société Jokko, intervenant dans le débat, et elle a été publiée par le journal Commo d’Africa : agro-agri-Afrique de l’Ouest, édition du 17 juillet 2019.

            La Z.L.E.C.A.F. (Zone de Libre Échange Continentale Africaine) arrimée sur le projet de méga-accord commercial à négocier entre l’Union africaine et l’Union européenne serait la clé de transformation du continent africain en atelier de l’Europe, à l’exemple de ce qui a fait la fortune de la Chine comme atelier du monde pendant plus de trois décennies (1978-2014). La Chine comme atelier du monde a accumulé des richesses qu’elle a bien gérées et qui lui ont permis de s’élever au rang de deuxième puissance économique en décembre 2014. Depuis cinq ans (2014-2019), la Chine se maintient à ce second rang de puissance économique mondiale conquis grâce à l’unité et la ténacité de l’État chinois enrichi par le monde.

            L’Afrique comme atelier de l’Europe jouirait également d’être celui de la Chine qui, après avoir mis sur table 60 milliards de dollars américains pour la création d’infrastructures et pour l’industrialisation de l’Afrique, a démontré qu’elle peut aider l’Afrique à accumuler des richesses en la connectant à ses réseaux mondiaux de commerce. L’exemple de cette approche chinoise en faveur de l’industrialisation et de l’enrichissement de l’Afrique par arrimage à ses réseaux commerciaux est la montée en puissance de l’Éthiopie. Celle-ci est en cours d’être industrialisée par la Chine, qui vend les produits industriels « made in Ethiopia » par elle, via le canal des réseaux du Moyen-Orient et de l’Europe.

            L’Afrique est face au choix de bénéficier de l’accumulation des richesses par la voie de l’Europe et de la Chine, à la condition qu’elle soit capable de participer au processus de la production industrielle en étant l’atelier de l’Europe par la Z.L.E.C. et par le méga-accord commercial.

C’est de cette accumulation des richesses dont l’Afrique a besoin pour pouvoir devenir ce qu’elle rêve d’être à l’avenir dans le monde des rapports de force constitué de trois composantes en perpétuelle compétition entre puissances d’Occident et d’Orient. L’Afrique qui rêve d’occuper le poste qui lui revient dans cette compétition de titans doit d’abord sortir de l’échec de son émancipation au cours des soixante ans d’indépendances ratées (1960-2020). Elle doit ensuite faire sortir les populations africaines de la misère, de la pauvreté et du sous-développement. Cette double démarche pourrait lui réussir grâce à des investissements à faire via les richesses à accumuler en tant qu’atelier de l’Europe et de la Chine.

            La remontée de la Chine en quatre décennies (1978-2019) de pays sous-développés au statut de puissance économique de premier ordre est-elle possible pour l’Afrique ? La Chine est un peuple, un pays, un État, une nation, une culture cinq fois millénaire. L’Afrique, quant à elle, est un vieux continent dont l’évolution s’est arrêtée à l’époque de l’âge de fer, il y a de cela trois mille ans. Elle a subi la domination du Moyen-Orient et le fléau de l’esclavagisme pendant mille deux-cent ans (du VIIème au XIXème siècle). Elle a également subi le même sort infligé par l’Europe pendant quatre siècles (XVème-XIème siècles). Elle a été reprise en mains par la Conférence Européenne de Berlin en 1885 qui l’a réinventée et réorganisée en cinquante-cinq pays à civiliser par l’Europe. La colonisation de l’Afrique par l’Europe a duré septante-cinq ans (1885-1960). Colonisation au terme de laquelle ces pays, crées par ladite Conférence à l’image des pays européens, eux-mêmes créés par le Congrès Européen de Vienne, ont acquis leurs indépendances en 1960 qui les ont fait accéder au statut d’États et de nations membres de l’O.N.U.  (Organisation des Nations unies). De ce fait, l’Afrique est un continent nouveau, fragile et fragilisable. L’Europe craint que l’Afrique tombe sous la reconquête du Moyen-Orient, ce qui serait une menace pour sa sécurité. Elle maintient sa domination sur le continent africain pour éviter qu’il devienne une rampe de lancement des attaques du bras armé, combattant et conquérant du Moyen-Orient contre l’Europe.

            La Chine, devenue puissance mondiale, s’est engagée à industrialiser l’Afrique en vue de constituer ensemble et à terme la « Communauté de Destin Commun Chinoise et Africaine. » En attendant cet avenir fusionnel de la Chine-Afrique, l’Afrique sera englobée dans la « chinindiafrique. »

            La question posée reste sans réponse ; elle est suspendue dans le doute. L’Afrique peut-elle se sauver ? Doit-elle attendre d’être sauvée par l’Occident ou l’Orient ? L’Afrique peut-elle et/ou pourra-t-elle se développer ou devra-t-elle être développée par l’Europe et la Chine ? Qu’est-ce qu’est l’Afrique d’hier, d’aujourd’hui et de demain ? L’Afrique est traditionnelle, arabo-musulmane, européenne (c’est-à-dire anglaise, française, portugaise, espagnole), chinoise, indienne et asiatique. L’Afrique est une œuvre multiculturelle et un riche tableau de multi-couleurs. L’Afrique est aujourd’hui une œuvre d’art politique et culturelle européenne. L’Afrique sera dans son futur un œuvre d’art industrielle chinoise.

RUKIRA ISIDORE Jean Baptiste

Éditorialiste Afrique

Le 31-07-2019