Osons briser le tabou : et si l’Afrique était la fille adoptive de l’Europe ?

Thème: les liens unissant l’Afrique et l’Europe ; de la création du continent africain jusqu’à nos jours.    

Cette filiation  commence avec le nom que les Grecs de l’Antiquité attribuèrent au continent africain, d’où provenait le vent de fraîcheur estivale propice aux relations humaines d’amour et d’amitié. Ainsi, ils appelèrent ces terres de l’horizon afros oikos. Ces deux mots d’origine grecque se sont contractés pour former le mot « Afrique », qui est de la même origine grecque que beaucoup de mots désignant des réalités d’hier et d’aujourd’hui. Par exemple, les cas de « politique » et d’ « économie » émanent, respectivement, de la contraction des mots grecs polis oikos et oikos nomos. Il en va de même pour « Éthiopie » qui provient de la contraction de ethios  ops ; de « panafricanisme » issu des trois mots panos afros oikos (« toute l’Afrique ») ; de « démocratie », terme né des mots demos kratos, signifiant « gouvernement du peuple » ; de « théocratie » engendré par theos kratos ; ainsi que de beaucoup d’autres expression d’usage universel et actuel.

Depuis des siècles, de l’Antiquité jusqu’à la Renaissance européenne au XVème siècle, le continent africain était désigné par deux noms d’origine grecque (donc européenne). Le nom « Afrique » s’appliquait à la partie nord du continent comprise entre la mer méditerranéenne et le fleuve Niger, tandis que, à la partie subsaharienne   du continent (= subsahara), s’appliquait la désignation « Éthiopie ». L’entreprise des navigateurs portugais pour chercher la voie maritime dans le but de relier l’Europe à l’Asie et afin de remplacer la route de la soie qui, depuis des millénaires, assurait les échanges commerciaux entre l’Orient et l’Europe (notamment entre l’Empire chinois et l’Empire romain) a eu comme effet le contournement du continent et l’extension de l’application du nom « Afrique » à l’ensemble du continent africain.

Ainsi, depuis la Renaissance européenne au XVème siècle, l’unité géographique et identitaire du continent africain résulte de la réinvention de l’Afrique par l’Europe. Vers la fin du XIXème siècle, il en a été de même lorsque l’Europe a dû réinventer l’Afrique par l’entreprise de la conférence européenne de Berlin qui, en 1885, décida de tirer l’Afrique du chaos des mille milliers d’Afriques (des tribus et des ethnies incessamment en guerre de razzias, vouant ainsi le continent à l’esclavagisme).

En 1885, la conférence européenne de Berlin a mis fin à la vieille Afrique, pétrie dans l’immobilisme depuis l’époque de l’âge de fer (depuis 3.000 ans). Elle a projeté le continent dans la modernité à la suite du rassemblement des mille milliers de pays et d’états premiers en une demi-centaine de pays modernisables. En 1885, la conférence de Berlin a créé les pays africains actuels à l’image des pays européens, créés quant à eux par le Congrès de Vienne en 1815, septante ans avant cette conférence.

Créés en 1885 à l’image des pays européens, les pays africains ont été soumis à l’indispensable accompagnement européen pendant septante-cinq ans : la colonisation de l’Afrique par l’Europe, de 1885 à 1960. Durant cette hibernation, l’Afrique nouvelle s’est formée et se compose aujourd’hui des pays africains créés par la conférence de Berlin en 1885. Ces pays ont ressuscité de la colonisation européenne grâce à l’accession aux indépendances en 1960, au statut d’états souverains, à la qualité de nations multiculturelles et à l’adhésion, en la qualité de membres, de la communauté mondiale par l’accession à l’Organisation des Nations Unies (O.N.U.).

Ces cinquante-quatre pays, états et nations d’Afrique sont les plus jeunes au monde. Ils existent depuis leur création par la conférence de Berlin (il y a de cela cent trente et un ans ; 1885-1960), ainsi que depuis la Renaissance de l’Afrique des entrailles de la colonisation européenne (il y a de cela cinquante-six ans ; 1960-2016). Ces pays se rassemblent en une communauté africaine qui aspire à l’unité africaine depuis maintenant cinquante-trois ans, c’est-à-dire depuis la création de l’Organisation de l’unité africaine en 1963 (l’O.U.A. ; 1963-2016) ; organisation aujourd’hui incarnée par l’Union africaine (U.A.) qui a remplacé l’O.U.A. dès le début du XXIème siècle, depuis juillet 2001.

Rassemblant en son sein la communauté des cinquante-quatre pays, états et nations d’Afrique (le Maroc, qui s’était pourtant retiré de l’O.U.A. en 1984, vient d’entamer, à l’occasion du XXVIIème sommet de l’Union africaine tenu à Kigali, au Rwanda, en juillet 2016, la démarche de sa prochaine adhésion à l’Union africaine, dont il s’apprête à être le leader), l’Union africaine bénéficie de l’accompagnement et de l’assistance de l’Union européenne. Cet accompagnement de l’Europe au bénéfice de l’Afrique est vital : il témoigne des relations privilégiées de filiation entre le « tonton Europe » et sa « fille adoptive Afrique », tout au long des millénaires jusqu’à nos jours.

 

rukira Isidore Jean Baptiste,

Éditorialiste Afrique

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